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Mystère et magie de la création :

 

Vouloir expliquer ce qui se passe effectivement

dans la tête de l'artiste lors de la création

pourrait paraître parfaitement utopique, ou prétentieux.

C'est pourtant ce que je vais tenter de faire ici.

 

On sait bien peu de choses de l'acte de création,

sinon qu'il est personnel et tout à fait inattendu.

Chacun a sa méthode ou son approche.

 

Ce que je propose maintenant,

c'est d'observer,

à travers le trou de la serrure,

ce qui peut se cacher

dans cet endroit mystérieux

qu'est l'atelier de l'artiste.

(Par atelier il faut bien entendu considérer tout lieu
où l'artiste se trouve, la bulle dans laquelle il s'isole,
que ce soit dans la nature ou chez lui).

 

 

Levons délicatement le voile de la création...
 

 

Pour certains artistes, il y a la nécessité première d'une sorte de rituel, de mise en conditions :

  • travailler toujours à la même heure, ou seulement la nuit,

  • porter un vêtement de type particulier,

  • commencer par un tour dans l'atelier, regarder le travail de la veille ou des jours précédents,

  • consulter des notes, revoir des croquis ou des ébauches,

  • boire une tasse de café, ou fumer une cigarette (avec modération...),

  • mettre de la musique ; écouter en boucle un air favori,

  • à moins qu'il ne soit préférable d'écouter le silence ou les bruits souvent discrets de la nature...

 

Quelques-uns sentiront comme un besoin irrépressible de saisir alors leurs pinceaux et vont se mettre à peindre sans s'interroger et sans relâche, jusqu'à l'épuisement parfois.

 

D'autres ne se lanceront dans l'aventure que lorsque l'œuvre aura véritablement pris forme dans leur esprit. Lorsqu'ils se sentiront sûrs d'eux. Dans cette attente, ils vont préparer leur matériel, découper des formats, apprêter des supports, compulser des documents, réaliser quelques ébauches...

 

Vous l'aurez compris, il y a bien des manières de créer, et là encore, il n'y a pas de règle.

 

Les créatifs sont souvent de grands enfants, fantasques et originaux. Instables et capricieux diront certains. Leur outil de base est le jeu. L'observation. L'expérimentation. L'invention. Le détournement d'utilisation d'un objet, d'une technique.

Ils vont se lancer des défis, réaliser des exercices dont ils auront écrit eux-mêmes les règles. S'appliquer à respecter scrupuleusement ces consignes. Les utiliser pendant une heure, des semaines, parfois des années.

Tandis que d'autres vont modifier très vite ces instructions s'ils s'ennuient ou s'ils sentent que rien d'intéressant n'arrive rapidement.

Considérer ce qui leur aura paru agréable ou amusant dans leurs découvertes récentes pour les réutiliser plus tard. Laisser passer du temps, revenir quelques heures après ou les jours suivants et repasser les tests proposés précédemment.

 

Le travail de l'oeil :

Lorsqu'il décide de peindre un sujet, un paysage par exemple, l'artiste a déjà franchi certaines étapes :

 

  • Entrevoir :
    Alors qu'il était sur le motif, son regard a furtivement entrevu, aperçu, repéré quelque chose du sujet. Quelque chose qui a éveillé son intérêt. Il ne sait pas encore précisément quoi, mais c'est déjà là. Il y a eu comme un éclair. Un flash. Une certitude. C'est de cela dont il a envie. Avec une sorte de gourmandise. De frénésie. C'est ce sujet qu'il va choisir. Tout est là. Tout y est. Devant lui. Enfin, il lui a semblé...

    Pour certains, cette étape est fondamentale. C'est ce genre de déclic qu'ils attendent pour décider de ce qu'ils vont peindre. Ils recherchent une forme particulière d'émotion, une sorte de perception instinctive. Revenus dans leur atelier, ils vont tenter de retrouver les conditions du premier contact avec leur sujet.
     

  • Regarder, diriger son regard :
    Maintenant qu'il sait qu'il tient son sujet, l'artiste va y revenir. Pour être certain que c'est le bon, il va le comparer à d'autres possibilités. Et pour ce faire, il va observer, considérer avec attention ce qui lui était apparu comme une évidence à la première approche.
     

Le travail du cerveau :

Le mental ne restera pas insensible aux sollicitations envoyées par l'œil. Aussitôt, il explorera ce qui a été perçu et envisagera comment tirer parti du sujet qui paraît si séduisant.
 

  • Percevoir, remarquer :
    L'œil du peintre saisira les particularités du sujet repéré, s'en imprégnera. Discernera ce qui pourrait lui convenir. L'isolera. Observera attentivement la scène afin de définir quel cadrage serait le meilleur, quelle mise en page lui conviendrait. Envisagera quelle partie du sujet il pourrait exploiter.
     

  • Discerner,voir :
    Il va maintenant fouiller, disséquer le sujet, noter les points essentiels, détailler certaines parties, relever la structure, la comparer à ses références propres.
     

  • Expérimenter :
    L'artiste va vérifier à nouveau l'ensemble en prenant quelques croquis, faire quelques esquisses ou pochades, sous des angles différents, avec ses outils préférés, ou ceux dont il dispose à cet instant précis.
     

  • Comprendre, synthétiser :
    Avant de se lancer dans la réalisation du tableau, le peintre va analyser les différents essais maintenant en sa possession, constater qu'il a tous les éléments qui lui sont nécessaires. Mettre à jour ses notes et ses relevés. Vérifier qu'il a bien une vue d'ensemble, qu'il a bien noté la structure, et effectué des croquis pour les détails importants ou les couleurs remarquables.
     

  • Redéfinir :
    À partir de tous ces éléments, l'artiste cherchera à mettre en valeur tel ou tel centre d'intérêt, en fonction de ses recherches, des préoccupations du moment, ou de ses intentions.
     

  • Choisir :
    Il va falloir choisir la direction que devra prendre l'Å“uvre :
    - s'orienter vers quelque chose d'esthétique ou de pure provocation (parfois involontaire) ?
    - poursuivre dans l'intention ou l'intuition ?
    - effectuer un travail de représentation, copier fidèlement le sujet ?
    - ou préférer l'interprétation, impliquant l'imagination ?
    - à ce stade tout est encore possible...
     

  • La fin du processus de gestation, pourra provoquer une certaine lassitude, un épuisement, ou au contraire engendrer une exaltation propice à l'action. Comparable à la libération de l'accouchement (enfin presque...).

 

Le travail de la main :

La main qui a déjà pu participer de manière active dans la prise de croquis et les notes, va maintenant pouvoir apporter sa pleine contribution.

 

  • Le travail ne va pas se faire de manière isolée. Ni linéaire. Le processus décrit ici supposerait que chaque organe fonctionne séparément. Bien sûr il n'en est rien. C'est dans une parfaite coordination que le mécanisme d'ensemble bien huilé, bien rodé, va fonctionner. Chaque artiste va trouver ce qui lui correspond.
     

  • Maintenant, la main a son mot à dire.
    Le travail de la main ne se limite pas à reproduire simplement. Sa participation au processus de création, c'est aussi le pouvoir de la main d'apporter son expertise, comme outil bien entraîné, rompu à organiser l'espace. Sa pratique régulière, son habileté, vont permettre de suggérer ce qui ne peut être appréhendé par des mots.
     

  • La gestuelle de la main, du bras, du corps, va donner à la touche une expression très personnelle, presque instinctive. Une écriture originale et farouche. Expressive. Favorisant les graphismes, l'expression picturale, les mouvements, le lyrisme, l'énergie...
     

  • C'est à ce moment que les habitudes, les résultats d'expériences précédentes, les jeux de matière et d'effets vont pouvoir jouer pleinement leur rôle. Par le choix des matériaux, des textures, des supports... Et nous venons de le voir, la manière dont la main va s'en emparer.
     

Pour quelques-uns, ces étapes pourront paraître bien inutiles, et l'euphorie les amènera à attaquer directement la toile ou tout autre support. Sans doute par expérience auront-ils déjà une idée précise de ce qu'ils cherchent.
 

Chacun a sa propre approche, singulière et originale...Il effectuera des associations et des rapprochements par rapport à d'autres œuvres, ou par rapport au travail entrepris récemment. Il ne s'agit ici que de pistes, et quiconque pourra les adapter à son propre usage.

 

Ce qui vient d'être énoncé pourrait laisser supposer que le processus est compliqué, (trop compliqué !), et que les différentes étapes énoncées doivent être franchies successivement. Bien sûr il ne s'agit que d'une manière sommaire de décrire "un" développement possible. La création ne se laisse pas enfermer aussi facilement. Dans bien des cas, ces "étapes" seront allègrement franchies en quelques secondes, et pas nécessairement dans cet ordre, par un artiste aguerri. Souvenez vous, pour l'artiste, le temps n'a pas la signification habituelle.

 

La démarche qui vient d'être décrite ici concerne plus particulièrement une création qui serait déclenchée par un événement visuel : dans l'exemple, la rencontre avec un paysage.

Mais cela pourrait tout aussi bien être une autre circonstance déclenchant une émotion, un souvenir...

 

Bien d'autres approches sont possibles. Je vous en propose deux autres :

 

Recettes magiques et Formules secrètes

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